Histoire d'une vie - Dernière partie

Publié le 5 Avril 2014

Le beau gris a désormais trois ans. Il a un peu grandi pendant l'hiver, mais surtout il
s'est préparé pour l'année qui l'attend. C'est principalement un travail de fond qu'ont
effectué tous les chevaux cantiliens, les pistes étant gelées pendant de longues
semaines. En mars les choses sérieuses ont reprises. Les galops sur la piste des Aigles
et sur l'hippodrome sont de nouveau à l'ordre du jour.
La rentrée du gris s'effectue à la fin du mois d'avril. C'est un Groupe II, mais le lot
n'est pas exceptionnel. Comme prévu, il gagne sans trop forcer.
Sa prochaine course est un test. Labellisée Groupe I, elle va lui servir à savoir s'il
peut continuer de prétendre courir encore cette année au plus haut niveau. La réponse
est claire et sans appel : il survole l'opposition avec une facilité déconcertante. De
courses en courses s'affirme une chose : ce cheval est hors du commun.


S'il fallait choisir les trois meilleures courses françaises, ça serait sans hésiter le Prix
de l'Arc de Triomphe, le Jockey-Club et son équivalent pour femelles, le Prix de
Diane. Et bien c'est décidé, le beau gris va aller courir le Jockey-Club. Avec déjà
l'Arc en ligne de mire.
Il y rencontre ce qu'il y a de mieux dans sa génération. Et pourtant il domine une fois
de plus très sûrement. Son dauphin est le même que lors de sa précédente course.
Mais cette fois, le gris double la distance qui les sépare à l'arrivée.
Maintenant c'est confirmé : objectif Arc à la fin de l'année.
Il court une dernière fois avant l'été. C'est sur ses terres natales, dans le mythique
hippodrome du Curragh qu'il tente le pari de l'Irish Derby. Mais pour la première fois
de sa carrière, ce pari est perdu. Ironie du sort, c'est devant un compagnon de casaque
qu'il s'incline. Son invincibilité est perdue. Pourtant, personne ne s'en inquiète. Cela
n'enlève en rien de la qualité au cheval.


Il passe une partie de l'été à Deauville. L'air y est plus frais et la mer offre la
possibilité de magnifiques galops sur le sable au lever du soleil. Le jeune gris galope
librement, la crinière fouettée par le vent, les sabots s'enfonçant dans le sable, son
souffle troublant le silence ambiant. Il semble empli de la liberté originelle du cheval.
Seuls au monde, uniquement le pur-sang et son cavalier face à l'immensité de la mer.


De retour à Chantilly, l'entraînement est particulièrement pointilleux. Tout doit être
parfait pour l'Arc. Avant le grand jour, il courra une préparatoire. Préparatoire qui
comme les autres courses, est marquée par la supériorité du gris.
Le dernier galop sur la piste des Aigles a une saveur particulière. Peut-être que c'est
son dernier. La décision de la fin de sa carrière de course n'est pas arrêtée. Beaucoup
de monde est venu observer les futurs partants de l'Arc. Chaque galop est
minutieusement scruté, à la recherche du moindre signe de forme ou de faiblesse.
Mais les chevaux n'en font pas trop, ils s'économisent pour le jour J.


5 octobre 2003, hippodrome de Longchamp, il est enfin venu le moment du
championnat du monde des purs-sangs. Ici s'écrit l'Histoire. Dans quelques minutes,
un cheval deviendra un des ceux qu'on oublie pas. Un de ceux sacrés rois de la
planète des courses. Les tribunes de l'hippodrome sont pleines. On vient du monde
entier voir cette course de légende. Du côté des écuries, c'est la tension qui règne en
maître. L'entourage des chevaux s'affaire dans le silence, autant par conscience du
moment historique que par nervosité. Les chevaux sont appelés au rond de
présentation. Ils arrivent, tous superbement préparés. Certains commencent à stresser
à cause de la foule. Le gris fait quant à lui preuve de son calme habituel. Les jockeys
se mettent en selle et se rendent aux boites de départ. Les quelques minutes durant
lesquelles les chevaux tournent devant les stalles sont interminables. Les jockeys se
concentrent. Les chevaux se calment avant la course. La foule s'impatiente.
L'entourage des chevaux retient son souffle. Enfin ils sont tous dans les boites. Ils
s'élancent d'un même mouvement. Comme prévu, le leader du gris s'installe en tête,
chargé de faire le rythme de la course. Le parcours de déroule sans encombre. Le
peloton arrive dans la fausse ligne droite, les chevaux accélèrent. Vient la ligne droite.
Chaque seconde paraît être une éternité. Un pur-sang prend l'avantage. Mais soudain,
le gris est lancé à pleine puissance. Il déploie ses foulées extraordinaire et fond sur le
cheval en tête. Le martèlement des sabots est couvert par des cris fusant des tribunes.
Le cavalier d'entraînement du gris encourage son protégé du mieux qu'il peut. Le gris
dépasse l'autre cheval et parvient à conserver son avantage.
Il a gagné. Il a gagné le Prix de L'Arc de Triomphe. Son nom est désormais écrit en
lettres d'or dans l'Histoire des purs-sangs. Dalakhani.


Epilogue :

Un an plus tard, on retrouve le superbe gris s'ébrouant dans un paddock. Il est
retourné en Irlande après sa victoire dans l'Arc. Sa carrière de course est finie, il se
consacre désormais à la reproduction. L'étalon part dans un galop majestueux. Il n'a
rien perdu de sa superbe.
Il semble nous rappeler que le pur-sang, cet animal divin, est à jamais un être libre.

Histoire d'une vie - Dernière partie

Rédigé par Elodie

Publié dans #Courses

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