Holliday on grass

Publié le 9 Août 2014

Qui tu es, toi qui me regarde sans émotion ? Pourquoi tu es planté là, au milieu de
l'écurie ? Tu me souris. Est-ce ma crinière en désordre ou le brin de paille coincé dans
mon toupet qui provoque cette moquerie ? Je ne sais pas qui tu es, je ne t'ai jamais vu
à l'écurie. Ca suffit j'en ai vu assez et toi aussi. Je me tourne dans mon box avec
dédain et offre à ta vue ma belle croupe baie. Le foin appétissant me fait vite oublier
ta présence. Je m'offre ensuite une petite sieste. C'est le milieu de journée, l'écurie est
calme. Mes copains partis aux courses ne sont pas encore rentrés, les autres sont aussi
actifs que moi. Seul mon voisin de box tente de regarder ce que je fais. S'il croit que
je vais m'intéresser à lui, il se trompe lourdement. Je suis une princesse, et tout ce
qu'il récolte est ma royale ignorance.
Un bruit me tire soudainement de mon repos. C'est un camion qui recule dans la cour.
Mais pas celui de d'habitude. Je ne m'en émeus pas, il en faut plus pour interrompre le
repos de l'athlète que je suis. Mais voilà que le bipède de tout à l'heure revient. Pire, il
entre dans mon box. J'inspecte ses mains pour vérifier qu'il ne m'apporte pas une
gourmandise, on ne sait jamais. Tout ce qu'il a c'est mon licol. Ca veut dire que je
vais sortir. Mais là, j'ai pas envie. Tentative d'intimidation en plaquant mes oreilles
dans mon poil. Aucun effet sur l'intrus, il me passe mon licol sans broncher. Il me
pose également de grandes protections aux membres. J'aime pas ses trucs, on peut pas
bouger avec. Je secoue violemment mon antérieur pour me libérer de cette affreuse
chose. Et voilà que je me fais gronder ! Il commence à m'embêter lui. Tiens pour la
peine je le mords à l'épaule. A peine mes dents se sont-elles approchées de lui que je
me prends une tape sur le nez. Cette fois je boude pour de bon.
Je le suis jusqu'au camion avec la plus mauvaise volonté du monde. Je rejoins deux
autres juments, dont ma grande copine. On s'entraîne dans le même lot le matin, et
vous pouvez êtes sûrs que s'il y en a deux qui font n'importe quoi sur les pistes, c'est
nous. Notre spécialité : faire de violents écarts quand notre cavalier s'y attend le
moins. C'est pas notre faute, il y a des fantômes au bord des pistes qui surgissent
brusquement.


Le camion roule pendant un long moment. Enfin on arrive dans ce qui semble être
une très grande écurie avec plein d'herbe autour. En descendant du camion, j'aperçois
une dizaine de congénères. Je leur lance un hennissement joyeux. Seuls deux sortent
la tête de leur box et me répondent. Je me rends compte qu'ils sont jeunes, plus jeunes
que moi. Ne me dites pas que je suis la plus vieille ici ?! Nous sommes conduits dans
des boxes un peu plus loin. Une gentille bipède vient m'enlever mes protections. Elle
me plaît mieux que l'autre méchant de tout à l'heure. Rapidement, elle me sort de mon
box. Je ne sais pas où on va mais je ne rate pas une miette de ce qu'il se passe à côté
de moi. Je retrouve ma copine et l'autre jument qui a voyagé avec nous à l'entrée d'un
endroit génial. Les deux-pattes nous libèrent et s'éclipsent. Nous mettons un petit
instant à observer l'endroit, puis nous partons à l'unissons dans un grand galop dans
l'immense pré. On joue, on se provoque. A côté de notre pré, un autre groupe de
chevaux broutent tranquillement. Je longe la clôture au grand galop pour les
impressionner. Aucun effet. Je repasse alors, mais dans mon plus beau trot, la queue
en panache. Cette fois ils s'approchent. Je reprends le galop et les deux groupes
galopent ensemble, chacun de leur côté de la barrière.
On décide enfin de se calmer. Je goûte l'herbe et respire à plein poumons cet air
différent de chez moi. J'adore cet endroit.


Nos journées s'écoulent toutes de la même façon, rythmées par nos jeux et nos
moments de folie. Ca fait du bien, après un an de bon travail, de pouvoir se reposer.
Le soir, on rentre au box. La douce bipède me fait toujours un long pansage. Il faut
dire que je prends un malin plaisir à me rouler dans l'herbe grasse afin d'être bien
sale. Oui je suis une princesse, mais une princesse en vacances. Et en vacances, pas
de courses, pas de photographes, pas de public. Alors pour une fois, ma belle robe
baie peut bien perdre de sa superbe.
Nous restons ici pendant plusieurs semaines. On se démuscle un peu, on fait du gras
même, mais notre moral est au plus haut.
Un matin, on est pas sorties au pré. On nous remet nos protections, et on remonte
dans le camion. Je retrouve mon box et mes habitude, prête pour une année de
réussite en course. Mais j'espère que l'année prochaine, on retournera dans ce grand
pré bien vert.

Holliday on grass

Rédigé par Elodie

Publié dans #Courses

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